L’Observatoire du logement à faible coût (LEMR) définit l’abordabilité sur le marché locatif en fonction de la ville où se trouvent les logements ainsi que des revenus médians et de la taille des familles locataires. Par conséquent, l’Observatoire présente des seuils de loyers abordables qui varient selon la région et la composition du ménage.
Sur la base des données de Statistique Canada, les graphiques ci-dessous démontrent que les loyers sont devenus de plus en plus inabordables malgré l’augmentation des revenus. Toutefois, ce phénomène n’est pas uniforme à travers les régions ou selon la taille des logements. La présente analyse met en évidence qui est le plus durement touché par la crise de l’abordabilité et où elle se fait le plus sentir.
L’évolution des seuils présentée dans le graphique 1 ci-dessous reflète l’augmentation des revenus des familles locataires et des personnes seules au cours de la période retenue. En bref, à mesure que le revenu d’une famille augmente, les loyers plus élevés deviennent de plus en plus abordables pour elle.
Le graphique 2 illustre l’évolution du pourcentage de logements locatifs rencontrant ces seuils d’abordabilité au fil du temps dans chaque région.
Alors que certaines régions, comme Calgary et Montréal, affichent une faible évolution de l’abordabilité au fil du temps, le changement est très marqué dans d’autres régions.
C’est à Toronto et à Vancouver puis à Halifax que les personnes seules sont confrontées aux défis les plus importants. Dans ces villes, les personnes disposant d’un revenu médian ne peuvent s’offrir qu’un très faible pourcentage de studios ou de logements d’une chambre à coucher. Toronto affiche également le déclin le plus net de l’abordabilité au fil du temps, la part des logements locatifs abordables par rapport aux revenus médians étant relativement faible au départ et chutant pour tous les types de familles.
Veuillez consulter nos Définitions des données pour savoir comment l’Observatoire du logement à faible coût définit l’abordabilité.
Les dossiers relatifs aux procédures d’éviction ont été obtenus au moyen de demandes d’accès à l’information faites par l’Observatoire du logement à faible coût à Calgary, Vancouver, Toronto, Winnipeg et Halifax. Nous soulignons ci-dessous plusieurs tendances que nous avons observées dans ces dossiers au fil du temps dans chaque région ainsi que des détails sur les variations dans la collecte des données selon les institutions.
Il importe de noter que ces données portent sur les procédures juridiques relatives aux cas d’éviction qui résultent généralement d’un litige entre propriétaires et locataires. Ces données n’incluent pas, par exemple, les cas d’éviction où le locataire a quitté son logement sans s’adresser au tribunal.
Pour de plus amples renseignements sur les sources de ces données, consulter la section Définitions des données.
Calgary
À Calgary, nous avons obtenu les dossiers d’éviction liés aux demandes déposées par les propriétaires auprès du Residential Tenancy Dispute Resolution Service de l’Alberta pour les motifs de résiliation du bail et de non-paiement du loyer. Dans l’ensemble, ces données ont révélé une légère diminution des demandes des propriétaires entre 2019 et 2020, suivie d’une trajectoire ascendante.
Vancouver
À Vancouver, nous avons obtenu les dossiers d’éviction liés aux demandes déposées à la Residential Tenancies Branch de la Colombie-Britannique en vertu desquelles un propriétaire souhaitait procéder à la reprise de possession d’un logement locatif. À partir de ces données, nous avons constaté que plusieurs périodes entre 2007 et 2022 avaient connu une baisse marquée suivie d’une forte augmentation.
Région du Grand Toronto
Dans la région du Grand Toronto, nous avons obtenu les dossiers d’éviction relatifs aux demandes suivantes déposées par les propriétaires auprès de la Commission de la location immobilière de l’Ontario :
L1 : demande d’éviction d’un locataire pour non-paiement du loyer et de recouvrement du loyer dû par le locataire;
L2 : demande visant à résilier la location et à évincer un locataire ou à percevoir un montant d’argent;
L3 : demande visant à résilier une location – le locataire a donné son préavis ou a accepté de résilier la location;
L4 : demande visant à résilier une location et à évincer un locataire – le locataire n’a pas respecté les conditions d’un règlement ou d’une ordonnance.
Les dossiers comprennent parfois plus d’une demande. Ceux qui comportent au moins une demande L1, L2, L3 ou L4 ont été inclus dans notre analyse. Dans l’ensemble, ces données démontrent une tendance à la baisse entre 2010 et 2022.
Winnipeg
À Winnipeg, nous avons obtenu les dossiers d’éviction liés aux ordonnances de reprise de possession requises soit pour non-paiement du loyer soit pour d’autres raisons. Dans l’ensemble, ces données montrent une augmentation des dépôts auprès de la Direction de la location à usage d’habitation du Manitoba entre 2006 et 2022.
Halifax
À Halifax, nous avons obtenu les dossiers d’éviction liés aux demandes suivantes auprès du Programme sur la location à usage d’habitation de la Nouvelle-Écosse :
Formulaire J : demande au directeur du Programme de la location à usage d’habitation de résoudre un différend entre un propriétaire et un locataire;
Formulaire K : demande au directeur du Programme de la location à usage d’habitation de résilier le bail d’un locataire en raison de loyers impayés sans participer à une audience ou à une médiation avec le locataire.
Ces données diffèrent de celles des autres provinces en ce sens que le formulaire J peut être utilisé par un propriétaire ou un locataire pour toute une série de motifs, y compris les litiges concernant les éviction ou la restitution d’un dépôt de garantie. Le formulaire K, en revanche, est utilisé exclusivement par les propriétaires, mais il ne représente qu’un sous-ensemble des dossiers d’éviction dans lequel le motif de l’éviction est le non-paiement du loyer et où le propriétaire souhaite procéder sans audience ni tenter une médiation avec le locataire. Un propriétaire ne peut pas déposer un formulaire K si le locataire a déposé un formulaire J ou s’il souhaite recevoir une compensation supplémentaire, par exemple pour des dommages. Les données révèlent une légère augmentation des dépôts de formulaires K au fil du temps. Les dépôts de formulaires J ont connu une diminution marquée en 2020, suivie d’une forte augmentation.
Conclusion
Les différences provinciales dans le traitement des demandes d’éviction rendent imparfaites les comparaisons directes entre les régions. Néanmoins, celles qui sont présentées ci-dessus indiquent que les demandes d’éviction ne suivent pas une trajectoire uniforme. Au contraire, les régions diffèrent, parfois de façon notable, en ce qui concerne les tendances en matière d’éviction, ce qui démontre la nécessité d’évaluer les problématiques de logement à la fois d’un point de vue systémique et d’un point de vue local.
Les lois sur l’accès à l’information visent à garantir à la population l’accès aux documents qui appartiennent au public. Cette législation est importante pour préserver la démocratie et la reddition de comptes, car elle permet aux citoyens et aux citoyennes de savoir comment les institutions fonctionnent et comment les décisions qui les concernent sont prises. Toute personne a le droit de soumettre une demande d’accès à l’information. De telles demandes sont souvent déposées pour obtenir des renseignements sur les services de police, les procédures judiciaires, les titres de propriété, etc.
Lors de l’élaboration de l’Observatoire du logement à faible coût, nous avons présenté des demandes d’accès à l’information pour obtenir des dossiers sur les procédures d’éviction, y compris la date, l’adresse du logement visé, le motif de l’éviction et le résultat obtenu. Il importe de noter que ces dossiers ne comprennent que les décisions autorisant des évictions rendues par un tribunal régissant les relations entre propriétaires et locataires (ou l’équivalent), généralement en raison d’un litige. Les évictions qui ont eu lieu sans qu’une procédure judiciaire formelle ait été engagée ne sont pas incluses dans ces dossiers.
Nous présentons ici quelques-unes des difficultés rencontrées lors de la collecte des données au moyen de demandes d’accès à l’information ainsi que leur incidence sur l’acquisition de connaissances.
Facteurs influant sur les délais
En moyenne, il a fallu 151,2 jours pour recevoir de chaque province les données sur les ordonnances d’éviction comprises dans l’Observatoire, à l’exception du Québec qui n’a pas fourni de dossiers malgré des demandes répétées.
Nombre de jours écoulés entre la demande et la réception des données
Province
Nombre de jours
Alberta
154 jours
Colombie-Britannique
59 jours
Manitoba
88 jours
Nouvelle-Écosse
197 jours
Ontario
258 jours
Québec
Aucune donnée reçue
Plusieurs facteurs peuvent expliquer le temps nécessaire pour recevoir les données sur les évictions. Tout d’abord, les méthodes de stockage des données dans chacune des provinces ne sont pas claires. Nous ignorons même quelles sont les données qu’elles conservent. Par conséquent, il a fallu négocier pendant plusieurs semaines ou plusieurs mois avec les gestionnaires des services d’accès à l’information et modifier les demandes pour faciliter la transmission d’un ensemble de données que l’instance responsable estimait pouvoir fournir. Dans le cas du Québec, deux demandes ont été soumises et toutes deux ont été refusées sans que nous puissions avoir recours à une procédure de révision, si bien qu’aucune donnée relative aux évictions n’est disponible dans la carte de la région du Grand Montréal.
Les délais ont également varié en raison des demandes de prolongation. L’Alberta, la Colombie-Britannique et la Nouvelle-Écosse ont toutes officiellement demandé plusieurs prolongations. D’autres retards sont dus à des difficultés administratives, notamment l’envoi de paiements au mauvais ministère, comme ce fut le cas en Ontario, et des modifications d’ententes demandées après réception du paiement, comme au Manitoba.
Format et expurgation des données
Malgré des demandes similaires dans toutes les provinces, les données reçues varient. La modification la plus fréquente demandée par les instances responsables était d’expurger, en tout ou en partie, les renseignements relatifs à la localisation. Conséquemment, au Manitoba et en Colombie-Britannique, seule une partie du code postal a été fournie pour chaque dossier. En Alberta, seul le nom de la municipalité a été fourni. Pour la Nouvelle-Écosse, les dossiers comportent un code postal partiel, un nom de municipalité ou encore ne comprennent aucune information sur la localisation, si bien que des données sont manquantes dans la carte de Halifax.
Un autre obstacle auquel nous nous sommes heurtés provient du fait que les données ont souvent été fournies dans des formats qui les rendent difficiles à traiter et à évaluer. L’Alberta et le Manitoba ont tous deux fourni des tableaux de données sauvegardés sous forme de longs documents PDF. Dans le cas de l’Alberta, les documents présentent des pages où les couleurs sont ombrées (texte gris clair sur fond blanc), ce qui les rend difficiles à lire. Pour surmonter ces difficultés, il a fallu consacrer plus de temps au traitement des données après leur réception afin que l’Observatoire puisse en disposer de façon utile.
Incidences
Les difficultés décrites ci-dessus ne s’appliquent pas uniquement aux demandes d’accès à l’information et elles peuvent avoir de fortes incidences sur l’acquisition de connaissances. Dans l’élaboration de l’Observatoire du logement à faible coût, les attentes prolongées et le manque d’informations géolocalisées ont eu pour conséquence que l’analyse des tendances locales, à court terme et émergentes en matière de demandes d’éviction n’a pu être réalisée.
Si les demandes d’accès à l’information ont permis à l’Observatoire d’obtenir de précieux renseignements sur les évictions, telles des informations sur la fréquence des ordonnances d’éviction au fil du temps, la résolution des problèmes systémiques que présente la procédure d’accès à l’information permettrait d’effectuer des analyses plus nuancées.
Région du Grand Toronto – Carte des données
Un outil centralisé de données cartographiques qui fournit de l’information cruciale sur l’emplacement et les caractéristiques du parc de logements locatifs à faible coût dans la Région du Grand Toronto.